samedi

Des passions funestes

Se griser des vengeances futures.

Ce fouet m’inspire un coup.

Celui ci boit et se saoule. Celui ci se saoule. Celui ci boit se saoule et se bat.

Haïr avec détachement.

Oh l’amour effrayant incrusté dans ses yeux !

Cet homme me hait parce que j’ai baisé son ancienne femme.

Ces pourceaux qui se croient sauvés. Ces anges qui sombrent.

A genoux devant la beauté trompeuse.

Le plaisir est à prendre sous l’arbre du pendu.

L’humilité en bouche. Au front : l’ambition.

Préférer aller corrompu plutôt que d’être caressé.


Combien de boulons vissés transformés en vérole convaincus de mensonges pour les viols consentis ?

Je suis froidement passionné.

Oh Dieu qui m’entends ! N’écoutes pas !

Est ce donc si difficile d’offrir son corps à un homme qui a faim ?

Comme un chien qui mord son squelette.

J’écoute craquer la musique de mes os.

lundi

Des poisons et de leurs effets (deuxième partie)

O cigarette
Enfonce un clou
Sur le cercueil moisi
Du remord

O cigarette
Enfonce un clou
Sur la carapace aguerrie
Du remord.

O haschich
Viens sur les plaies béantes
Et noircies
Du remord

O haschich
Viens adoucir de ta fumée
La douleur
Du remord

O alcool
Que sous ton mensonge s’endorme
La vérité
Du remord

O alcool
Emporte moi loin de la vie
Loin de l’enfer
Du remord.

Ainsi pouvait s’exprimer Igor Mochkine après une seconde bouteille de vodka. Ce qui ne
l’empêchait pas, lorsqu’il était en forme, d’entonner d’une voix de stentor, une vieille chanson
de son pays natal.

Amertume, amertume
Tu me feras mourir de chagrin
Comme aux temps anciens
Mal contre qui l’on ne peut rien

Nostalgie, nostalgie
Ma souffrance au lieu d’ennui
Dois je pour cela te dire merci
Mal dont jamais on ne guérit

Mais déjà s’enfuit l’été
Et je ne l’ai pas vu passer
Car je n’ai fait que pleurer
Comme une femme abandonnée


Tout l’été

J’ai regardé pourrir les fleurs
Et j’ai respiré leur odeur
Volupté désaxée
Vivent les roses fanées

Puis, proprement envoûté par la tristesse de son chant, il lui arrivait de s’adresser à voix basse à son grand amour défunt…

Je ne reçois plus aucun message des cieux,
et comme Tristan et Iseut nous gisons enchaînés, sous la neige, là bas,
Natalia.
Quand l’oiseau bleu de la mélancolie décoche son chant dans ma chair,
au bout de cette nuit de folie . Tu dors au pays,
où s’enfantent les fées jolies. Puisse tu revenir un jour à toi.
Me redonner le don de vie,
Natalia.

Après cela , les curieux devaient tendre l’oreille pour l’entendre psalmodier, à voix très basse,
un de ses ténébreux soliloques au cours desquels, il s’adressait à la morte.

J’ai bien reçu tes revolvers
tes bouquets de fleurs et d’éclairs,
tes poisons lents, violents, divers.
Et je sais comme sont perdus les yeux solitaires qui ont vu,
la lumière de l’amour nu et se sont chargés des ténèbres.

Soudain, sans crier gare, Mochkine éclatait d’un rire puissant, débonnaire et cynique. Chacun savait alors qu’une pipe d’opium devait lui être apportée dans la seconde .Sans quoi s’enclenchait ce despotisme moqueur et sanglant où, sous la contrainte d’une arme, il forçaitde jeunes hommes à des parties de roulette russe dont il sortait toujours, par miracle, ricanant et vainqueur.